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Le droit au logement frappe à la porte de l’Europe

A Bruxelles, les premiers Etats généraux européens pour le droit au logement dressent un constat alarmant.

Bernard Birsinger, feu l’ancien maire communiste de Bobigny, en avait rêvé. Ses amis l’ont fait. Les 5 et 6 novembre 2007 derniers, plus de 130 représentants d’organisations engagées dans la défense des mal logés ou des sans logis, d’ONG, d’associations d’habitants et de locataires, mais aussi des élus locaux, des députés européens, le président du CECODHAS, qui coordonne au niveau européen les gestionnaires des logements sociaux, se sont retrouvés au sein du Parlement européen, à Bruxelles, pour les premiers Etats généraux européens pour le droit au logement (EGEDAL). Co-ordonné par l’Alliance Internationale des Habitants (AIH), l’Association nationale des élus communistes et républicains (ANECR), la Plate-forme pour un Logement Digne (Espagne) et le Réseau d’élus et d’autorités locales progressistes d’Europe (REALPE), l’événement est la suite logique des Etats généraux pour le droit au logement initiés en France en 2004. Mais des racines plus anciennes pourraient être repérées dans la Charte Européenne pour le Droit à Habiter et la Lutte contre l'Exclusion Sociale, née à l'issue des premières rencontres informelles des ministres européens du logement au début des années 90.

Les nombreux témoignages égrenés au fil de ces deux journées ont permis de dresser un état des lieux inquiétant du mal ou de non logement dans une douzaine d’Etats du vieux continent. Si les situations diffèrent énormément selon les pays, tous les participants ont vivement dénoncé l’abandon par les Etats du secteur du logement. Eva-Britt Stevenson, députée européenne suédoise (GUE/NGL), a ainsi expliqué comment, sous la pression de l’Union européenne et des choix politiques de la majorité de centre-droit, son pays - qui considérait jusqu’alors le logement comme un droit pour tous quels que soient les revenus des ménages - se dirigeait actuellement vers une « privatisation rampante », en réduisant ses dotations pour les aides au logement et en s’apprêtant à mettre en vente 860.000 logements publics. Analyse partagée aussi par l'eurodeputée socialiste Marie-Noëlle Lienemann, ancienne ministre française au logement. En Russie, ce sont les réformes « ultra-libérales » du gouvernement de Vladimir Poutine qui fragilisent l’accès au logement. Selon Carine Clément - qui n’a pu faire le voyage depuis Moscou à cause du refus des autorités russes -, ces réformes ont eu pour conséquence de jeter à la rue des milliers de familles au profit de promoteurs véreux, sous la bénédiction de pouvoirs publics locaux corrompus. Le cas des Roms, stigmatisé et partout discriminés, a été évoqué à de nombreuses reprises par les participants. Miroslav Prokes, conseiller municipal de Prague (République Tchèque), a expliqué qu’ils constituaient 90 % des personnes vivant dans les quelque 300 bidonvilles que compte son pays. En Italie, c’est le nouveau décret concernant les ressortissants Roumains, qui vient se rajouter à la politique de destruction des bidonvilles sans aucun relogement et à la non approbation d'un décret de protection des locataires expulsables, qui sont dénoncés conjointement par Cesare Ottolini, animateur de l’Alliance Internationale des Habitants, et Paolo Gangemi de Rifondazione comunista.

« Il faut que l’Union européenne prenne au sérieux la question du droit au logement », a estimé Heinrich Niemann, engagé dans LHASA, association de restructuration urbaine à Berlin. Pour autant, a prévenu Pierre Mansat, adjoint au maire de Paris, « ce sont aujourd’hui les marchés financiers qui décident comment se fait la ville. Grâce à leur force de frappe, les fonds d’investissement sont en capacité de déstabiliser les politiques publiques. » Ce fut le cas à Berlin où, « en dix ans, des fonds d’investissement ont pu s’offrir 1,8 million de logements publics », a précisé Barbara Litke, représentante, à Bruxelles, de l’Union internationale des locataires

Ces EGEDAL n’auraient-ils été qu’un constat d’impuissance? Non, répond Cesare Ottolini. « Ces Etats généraux sont une étape fondatrice vers la constitution d’un mouvement européen de résistance et d'alternative ». Durant ces deux journée, des dizaines d'intervenants, de Jean-Pierre Giacomo, président de la CNL française, à Paul Trigalet, de Solidarités Nouvelles (Belgique), en passant par Joseph Jones (Thames Valley Gypsy Association, Royaume-Uni), Daniele Porretta (Plate-forme pour un Logement Digne), Knut Unger (Union des Locataires de Witten, Allemagne) ou encore Annie Pourre (réseau No-Vox), ont présenté une grande richesse d'analyses, de propositions, et de luttes.

Dans la déclaration finale des EGEDAL, les participants se sont engagés à organiser des Etats généraux dans leur pays et à agir pour demander « le développement d’un véritable service public du logement et de la ville » pour que le droit au logement soit reconnu au niveau de chaque pays et au niveau européen. En attendant, les membres des EGEDAL seront présents lors du Forum Social Européen (Malmö, 18-27 septembre 2008) et également lors de la rencontre européenne des ministres du logement, programmée à Paris le prochain octobre 2008 sous la présidence française de l'UE.