Moscou, les Journées Mondiales Zéro Expulsion ont débuté en Russie
Le premier octobre à Moscou a eu lieu une rencontre avec Cesare Ottolini, membre du comité consultatif d'UN-Habitat sur les expulsions (AGFE) et coordinateur de l'Alliance Internationale des Habitants (IAI).
La rencontre a été organisée par le mouvement social Moskovskij Soviet et par l'institut pour l'Action Collective. Les participants ont examiné les questions relatives aux expulsions, à la situation des retraités, aux “membres escroqués des coopératives de logement” etc. Sont intervenus les représentants des villes de Shcherbinka, “Rechnik” , Butovo, Menshikov, Rozhdestvenka, et de Brateevo.
Lors de cette rencontre, les activistes russes ont parlé de l'initiative de protestation sociale “Sortir de la crise, non pas sur le dos des gens”, organisée pour le 10 octobre dans le cadre de la semaine panrusse di mobilisation : parmi les revendications, il y a le blocus des constructions dans les zones vertes, la conservation des monuments historiques et architecturaux, le dédommagement complet pour la démolition des maisons et des garages, la reconnaissance de l'illégalité du Plan Général du développement de la ville jusqu'en 2025. La Semaine de mobilisation est organisée par l'Union des coordinations des Soviet de la Russie dans plus de 50 villes : Moscou, Saint Pétersbourg, Kaliningrad, Tyumen, Kazan’, Magnitogorsk, Omsk, Perm’, Saratov, Novosibirsk, Krasnojarsk, Barnaul, Rostov-sul-Don, Ivanovo, Pensa et d'autres.
Au cours de cette initiative, on a discuté du renforcement de la collaboration entre le mouvement russe pour le logement et les organisations internationales. Cesare Ottolini a annoncé qu'en 2011 au Sénégal, aura lieu l'Assemblée mondiale des habitants. L’objectif est la création d'un réseau international de mouvements urbains pour le droit au logement qui luttent ensemble contre la politique du logement néolibérale et antisociale. “Les problèmes des habitants sont présents dans chaque pays, abstraction faite du type de gouvernement ; la chose la plus importante est de lutter ensemble”, a observé Ottolini. Il a été décidé de créer plus tard un forum panrusse des habitants avec la participation des représentants internationaux, lesquels examineront non seulement les problèmes locaux mais choisiront les délégués qui participeront à l'Assemblée mondiale.
Cesare Ottolini a expliqué que son devoir, en tant que membre AGFE, est celui de contrôler ce qui arrive dans les différents pays, y compris la Russie, dans le cadre de la sphère du logement. A la fin de la réunion, il a été décidé que les coordinateurs du Moskovskij Soviet remettront des documents sur les violations massives du droit au logement des Moscovites, dans le but de préparer un rapport à l’ONU.
Les Journées Zéro Expulsion continuent dimanche 4 octobre à S. Pétersbourg, par une rencontre avec Cesare Ottolini , dans le Centre d'appui aux organisations non gouvernementales (Ligovski Prospekt, bâtiment 87, ufficio 300). L'organisateur de l'initiative à Pétersbourg est le Mouvement des initiatives civiles (DGI). Les organisateurs invitent à cette rencontre les activistes de DGI, de “Ville vivante”, les comités d'initiatives qui luttent pour le droit au logement. Pour de plus amples renseignements sur la rencontre de Saint Pétersbourg, composer le n.: 8-911-923-39-47.
Qu'est-ce que l'Alliance Internationale des Habitants ?
Les activistes russes pour le droit au logement connaissent Cesare Ottolini depuis très longtemps. L’Alliance Internationale des Habitants (IAI) est une organisation fondée en 2003, composée d'un réseau d'associations d'habitants, de locataires et propriétaires de leur propre logement, de groupes d'initiative, de comités de sans-abri et des habitants de baraques, de coopératives de logements et de centres sociaux, de volontaires et d'émigrés, et de comités de lutte de nombreux pays. Cette organisation, basée sur une Carte de principes, est gérée par un Comité de coordination avec l'aide d'un Comité de soutien technique.
L’action prend deux directions fondamentales : les campagnes de protestations et la formation. Depuis 2006, une école pour les activistes pour le droit au logement est en place alors que ladite Université Populaire Urbaine fonctionne déjà dans certains pays, notamment en Amérique Latine. Les informations et le débat se répandent soit via le site, soit par la Newsletter multilingue IAI (contribution d'environ 300 traducteurs volontaires).
La campagne Zéro Expulsion
Et en ce qui concerne les campagnes, la plus importante est actuellement “ Zéro Expulsion !”.
La plus grande victoire a été obtenue en 2004 à Nairobi, au Kenya, où près de 300 000 habitants des baraques étaient menacés d'expulsion à cause du plan de “reconstruction” du centre de la ville. Ce plan a été arrêté grâce à la lutte des associations locales et à l'intervention de l'IAI. Dans ce cas présent, l'IAI a agi de la manière suivante : une pétition internationale signée sur internet a été diffusée. Chaque signature a été envoyée sur les ordinateurs des parties adverses. Nous avons recueilli ainsi 10 000 signatures et ceci a eu une grande répercussion sur les médias. A la fin, le projet a été à tel point discrédité aux yeux de l'opinion publique que les investisseurs étrangers ont renoncé à participer alors que le gouvernement kenyan a renoncé à son projet.
Cesare s'est rendu quelquefois sur site pour contrôler le niveau de la situation. Maintenant , les habitants des quartiers sauvés reçoivent la reconnaissance du droit à la propriété du logement et de la terre, si possible en propriété collective et non individuelle, comme l'a souligné Cesare. Une chose importante, du moment qu'elle ne peut pas être vendue pour spéculation aux particuliers. Grâce à la mobilisation, le gouvernement italien a accordé l'annulation de la dette étrangère du Kenya, libérant ainsi des ressources pour l'amélioration des quartiers pauvres.
L'IAI a opéré différemment dans le cas de la violation du droit au logement en Italie, où près de 600 000 personnes ont été menacées d'expulsion en raison de retard de paiement. En février 2005, les coordinateurs de la mobilisation ont invité la commission AGFE à vérifier le respect du droit au logement. Le travail de la commission a bien été mis en évidence par les médias et leur compte-rendu a provoqué un scandale. Ceci a conduit la commune de Rome à signer un protocole qui prévoyait la suspension des expulsions et le développement d'un programme de construction de logements populaires.
La situation de la Croatie est plus proche de la réalité russe, qui en vérité est le prototype de notre avenir. Après l'abolition de la loi de la privatisation gratuite en 1996, les frais locatifs ont brusquement augmentés (de 60% à la fin de 2005) et environ 40 000 personnes, pour la plupart des personnes âgées, ont risqué de perdre leur logement. Dans ce cas, l'IAI a fait pression sur le gouvernement croate par l'entremise de l'Union Européenne, dans laquelle la Croatie espère rentrer, et depuis l'IAI aide les associations dans l'organisation de la défense des droits des locataires, une chose à laquelle la population locale n'est pas bien habituée (encore moins en Russie).
Comme nous pouvons le constater d'après les exemples cités, l'IAI utilise de nombreux moyens pour déployer la campagne internationale de solidarité : pétitions (essentiellement par internet), influence sur les médias, pression des institutions (par l'intermédiaire des gouvernements ou des structures internationales comme l’ONU), pression sur les corporations transnationales grâce aux campagnes de discrédit. Cependant, comme l'a souligné Cesare, l'IAI n'est pas en soi une structure officielle et ne possède aucun pouvoir. Toutes les initiatives dépendent des activistes locaux qui décident quel est le chemin à suivre.
Vers une mission AGFE en Russie
L’Alliance Internationale des Habitants (IAI) opère aussi à travers des institutions officielles, en premier lieu, l’ONU. Cesare ainsi que certains activistes sociaux sont membres du Comité Consultatif UN-Habitat sur les expulsions (AGFE), dont la présidente est madame Anna Tibajuka. AGFE veille, en particulier, au respect des normes nationales et internationales relatives au droit au logement (y compris l'article 11 de la Convention Internationale sur les droits économiques, sociaux et culturels qui engagent les pays signataires, y compris la Russie, au respect du droit au logement et à son entretien moyennant des mesures politiques adéquates). Pour l'accomplissement de leurs missions, les membres de AGFE peuvent se rendre dans le pays d'où remontent les informations de violation ou de cas litigieux.
Depuis déjà deux ans, l'idée d'une mission AGFE en Russie était née. Il est toutefois évident que l'ONU est une structure très bureaucratique et officielle et oeuvre à juste titre seulement en accord avec les gouvernements nationaux. Malgré cela, grâce aux efforts conjugués de Cesare et des organisations pour le droit au logement russe, il s'avère que l'affaire soit sortie du point mort où elle était restée. Le comité AGFE a regroupé suffisamment d'information sur les violations du droit au logement en Russie (expulsions forcées, expropriations illégales des terres, scandales avec “investisseurs escroqués”, obstacle à la mise en oeuvre du droit à l'autogestion de l'habitation etc.), et toujours plus de membres du comité mettent la pression afin que soient organisées des “missions”d'experts de l’ONU dans certaines villes du Pays.
En préparant l'étape russe de l'Assemblée Mondiale des Habitants
Enfin, la troisième priorité de l’Alliance Internationale des Habitants en particulier et d'autres associations, c'est la préparation de l'Assemblée mondiale des Habitants pour 2011. Le processus de l'organisation est l'instrument pour la consolidation des mouvements pour le logement soit à l'intérieur du pays, soit parmi les différents pays. A ce sujet, Cesare s'est adressé à IKD, à SKS, au mouvement des retraités du logement et à l’Union des Habitants proposant d'appuyer en Russie le processus de préparation de l'Assemblée. Cela signifie qu'en prévision de 2011, nous devons réaliser plus de forum locaux pour le logement et par la suite un forum national (russe) qui envoie à l'Assemblée internationale les délégués et qui mette en place des propositions au nom du mouvement russe. Comment peut-on réaliser tout cela en Russie, où le processus de création de contact parmi les différents comités d'initiatives ou parmi les différentes associations pour le logement a tout juste commencé non seulement au niveau national mais aussi au niveau de chaque ville ?
Il s'agit d'une demande de plus en plus importante si l'on prend en considération le contraste à l'intérieur du mouvement, déchiré de l'intérieur par des questions délicates : campagnes de protestations ou collaborations avec le pouvoir, autogestion du logement ou tourner le dos à la cause publique, mouvements civiles ou mouvements politiques, groupes d'initiatives ou organisations non gouvernementales professionnelles. Il est clair que les forces de la seule structure ne suffisent pas. Malgré cela, Cesare a insisté afin que la structure de base, civile et de protestation puisse initier ensemble le processus étant donné que c'est la force principale sur laquelle il est nécessaire de s'appuyer pour structurer un mouvement international actif et capable d'être utile même à un niveau local.